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Halte à la soumission belge au terrorisme de l’Etat turc

vendredi 12 mars 2010, par Maison Populaire de Genève

Communiqué commun de quatre organisations issues de l’émigration politique en provenance de Turquie

Depuis le lancement d’une grande opération policière contre les institutions kurdes en Belgique, les communautés kurde, arménienne et assyrienne subissent l’angoisse en constatant que le terrorisme de l’Etat turc qu’elles ont fui les menace une fois de plus par la collaboration active de la police de leur nouveau pays.


Vu l’ingérence croissante de l’Etat turc dans la vie politique, sociale et culturelle de la Belgique et le silence et la passivité incroyable des milieux démocratiques contre cette situation menaçante, nous tenons, en tant qu’organisations issues de l’émigration politique en provenance de Turquie, à attirer l’attention de l’opinion belge sur les faits suivants :

L’opération policière du 4 mars 2010 contre les institutions kurdes en Belgique représente un nouvel épisode de l’exportation du terrorisme de l’Etat turc contre le peuple kurde, un terrorisme qui est poursuivi depuis un siècle et soutenu depuis un certain temps par les Etats-Unis pour sauvegarder leurs intérêts stratégiques et économiques dans le Moyen-Orient.

Comme révélé par le sénateur belge Geert Lambert, le coordinateur adjoint du service antiterrorisme du ministère américain des Affaires étrangères, Frank Urbancic, avait tenu en février 2008 une série de pourparlers avec les autorités belges et turques pour assurer une coopération dans la lutte contre le PKK. Il a déclaré dans le journal turc Hürriyet du 13 février 2008 : "Nous avons une approche commune pour veiller à ce que les affaires instruites par les Turcs puissent être utilisées devant les tribunaux européens." Il a qualifié la nouvelle approche de "tactique Al Capone", du nom de ce gangster américain tristement célèbre qui fut finalement condamné à la prison pour fraude fiscale.

Les médias rapportent que quelques jours avant cette opération, une série d’échanges d’informations entre la Turquie, les USA et la Belgique ont eu lieu.

Cette opération vise, comme exigé par l’Etat turc, à étouffer Roj TV, la première voix libre du peuple kurde opprimé dans quatre pays dont la Turquie. Il ne s’agit pas uniquement d’une attaque directe contre les droits fondamentaux du peuple kurde, mais également une violation flagrante de la liberté de l’expression.

Les razzias contre le Congrès national du Kurdistan (KNK) et d’autres organismes kurdes ainsi que l’arrestation de deux anciens députés kurdes, réfugiés en Europe depuis plus de dix ans constituent une autre violation flagrante des droits fondamentaux du peuple kurde.

Comment les autorités belges comment expliquent-elles cet acharnement contre des hommes politiques, journalistes et dirigeants associatifs kurdes catalogués comme "terroristes" par l’Etat turc alors que les instigateurs et auteurs turcs d’une série d’actes terroristes contre les institutions kurdes, arméniennes et assyriennes sur le territoire belge jouissent d’immunité et restent toujours impunis ?

Comme il est expliqué de façon très claire dans une déclaration commune par le Group de travail interparlementaire, l’Institut Kurde de Bruxelles et Vrede vzw :

"En Belgique, la police a perquisitionné les studios de la TV kurde à savoir l’émetteur Roj-TV qui semble être particulièrement mal accepté par le régime turc. En 1996 déjà, cela avait été le cas pour Med-TV dans le cadre de l’opération Spoutnik. Ils avaient aussi à l’époque visité les studios de Denderleeuw, après avoir enfoncé les portes et ils avaient confisqué l’appareillage électronique. Dix ans après, on ne parle plus de l’opération Spoutnik, en effet on n’a jamais pu démontrer que les 17 suspects emmenés à l’époque aient appartenu à une quelconque organisation criminelle. On vient de recommencer la même opération et les ordinateurs de Roj-TV ont été également mis sous scellés et embarqués. Pourquoi cette répétition d’une opération qui n’avait jamais donné de suite. Va-t-on à nouveau parler des sérieuses présomptions des autorités judiciaires pour expliquer une opération qui n’a sans doute qu’un seul but : faire taire la TV kurde qui demande tout simplement le droit d’exister.

"Plusieurs éléments de cette soudaine agression contre les Kurdes peuvent nous faire penser que les autorités judiciaires l’ont organisée à la demande pressante d’Ankara. Dès la fin de l’opération, le ministre turc des affaires étrangères Ahmet Davutoglu adressait ses félicitations à notre pays pour son sens des responsabilités. Il est vrai que fin décembre, notre Premier ministe, M. Leterme avait promis au pouvoir d’Ankara d’augmenter la coopération entre la police belge et la police turque et cela afin de faire taire toute opposition kurde en Belgique. Ce 18 janvier, le nouvel ambassadeur de Turquie, Murat Ersavci, a été reçu par M. Leterme et le ministre de la Justice M. De Clerck pour lancer une opération de répression contre Roj-TV et d’autres organisations kurdes. Cela prouve que tout avait été organisé entre Bruxelles et Ankara afin de limiter une fois de plus les droits culturels des Kurdes."

Comme il est indiqué dans ce communiqué, cette action en Belgique est la simple continuation de l’oppression culturelle subie par les Kurdes en Turquie. A de nombreuses reprises, les communautés kurde, arménienne et assyrienne ont subi en Belgique des agressions téléguidées par Ankara :

Au début 1994, cent cinquante Kurdes participant à une marche pacifique ont été agressés par plusieurs centaines de Loups Gris quand ils sont arrivés à Saint-Josse.

Cinq ans plus tard, le 17 novembre 1998, l’Institut Kurde de Bruxelles, le Centre Culturel Kurde et un local assyrien ont été attaqués et incendiés par les Loups Gris devant la police.

Le 10 décembre 2005, un engin incendiaire a été lancé dans les locaux du bureau du parti pro-kurde DEHAP, détruisant la porte d’entrée.

Le 2 décembre 2006, des centaines de Loups Gris s’étaient rassemblés place Saint-Josse pour attaquer les locaux kurdes après la distribution d’un appel contre la présence d’une association kurde située à Saint-Josse-ten-Noode, mais grâce aux mesures préventives prises par la police, cette tentative a échoué.

Dans la nuit du dimanche 1er avril 2007, les locaux de la même association ont été ravagés par un incendie criminel. A l’étage, les habitants ont été exposés au risque de brûler vifs.

Le 21 octobre 2007, après une manifestation non-autorisée devant l’ambassade des Etats-Unis à Bruxelles, les Loups Gris, en hurlant des slogans nationalistes et en portant le drapeau turc et celui des Loups Gris (trois croissants), ont attaqué un disquaire kurde et saccagé un café détenu par un citoyen d’origine arménienne à Saint-Josse-ten-Noode. La police avait assisté passivement à ces violences racistes.

Nous nous joignons à l’interpellation que le Comité des Arméniens de Belgique (CAB) a faite après la dernière opération policière contre les institutions kurdes :

- Aucune sanction contre les fanatiques turcs qui ont semé la terreur une semaine durant fin octobre 2007 à Saint-Josse-ten-Noode n’a été prise et, qu’il proteste contre le classement sans suite de la plainte de Peter Petrossian, dont le commerce a été saccagé et la vie menacée pour le motif qu’il est d’origine arménienne.

- Comment notre Justice justifiera-t-elle d’avoir étalé de tels moyens non pour la sécurité de notre pays mais pour celle de la Turquie, un pays qui se moque des droits de l’Homme, ne renonce pas au génocide et tente d’entrer en Europe par effraction ? Sous quel joug est tombé notre pays de liberté pour qu’il en vienne à prêter la main à un tel oppresseur ?

- Comment notre Justice justifie-t-elle cette opération alors que les milieux ultra-nationalistes turcs en Belgique se renforcent dangereusement ? Que leurs manifestations sont tolérées et qu’elles ont mené à des destructions et mises à sac de Bruxelles ?

Nous tenons à attirer l’attention une fois de plus sur le fait que ces agressions en question ont été provoquées par des organisations nationalistes et par certains médias turcs au service de l’Ambassade de Turquie à Bruxelles.

En plus, toutes les opérations répressives contre la communauté kurde en Belgique sont, comme indiqué ci-haut, préparées dans une collaboration étroite entre les autorités policières turque et belges. Qui plus est, ces opérations sont exécutées avec la participation active des policiers d’origine turque.

Un des plus influents quotidiens turcs, Milliyet, donne le 6 mars 2010 l’information suivante qui n’a pas été démentie par les autorités turques et belges :

"Selon l’information reçue, les services de renseignement turcs ont été très actifs dans les récentes opérations contre le PKK en Italie, en France et dernièrement en Belgique. Juste à la veille et lors de l’opération en Belgique, le département de renseignements de la direction générale de la Sûrete turque a été dans une communications fréquente avec la police belge. Les renseignement fournis par la Turquie ont constitué la base de l’opération en Belgique" (Milliyet, Tolga Sardan et Gökçer Tahincioglu, 6 mars 2010)

La relation de la police turque avec la Belgique n’est pas limitée à la police belge. Depuis certain temps, la police turque a des relations privilégiées dans le monde politique belge. Par exemple, le chef de police d’Istanbul Celalettin Cerrah, accompagné de son chef de renseignements Ahmet Ilhan Güler, avait rendu une visite au Secrétaire d’Etat bruxellois Emir Kir à Bruxelles le 19 janvier 2007. Quelques mois plus tard, le 8 avril 2007, le même secrétaire d’Etat Emir Kir a assisté aux célébrations du 162e anniversaire de la fondation de la police d’Istanbul en tant qu’invité d’honneur.

Comme nous avons signalé dans nos communiqué précédents, les communautés kurde, arménienne et assyrienne vivent actuellement dans un trou noir créé en Belgique par le régime répressif d’Ankara en raison du laxisme de certains hommes politiques belges ; un trou noir qui peut générer, à n’importe quel moment, une nuit de cristal, et même une purification ethnique dans la Commune de Saint-Josse.

La colère et les déclarations provocatrices des dirigeants d’Ankara et leurs représentants à l’étranger contre la réconnaissance du génocide des Arméniens, des Assyriens/Syriens/Chaldéens et des Grecs pontiques en 1915 par le Parlement suédois deviennent de plus en plus inquiétantes.

Ayant déjà réagi dans le passé contre toutes les agressions précitées, nos organisations issues de l’émigration politique en provenance de Turquie :

* protestent contre l’opération répressive visant les institutions kurdes,

* demandent la libération immédiate des personnalités kurdes menacées d’une extradition vers la Turquie,

* demandent l’ouverture d’une enquête afin d’identifier et de punir les agresseurs et surtout les instigateurs de la terreur effectuée contre les institutions kurdes, arméniennes et assyriennes,

* demandent une vigilance contre les éventuelles agressions visant ces institutions et tous les opposants du régime d’Ankara.

L’Association des Arméniens Démocrates de Belgique

Les Associations des Assyriens de Belgique

L’Institut Kurde de Bruxelles

La Fondation Info-Türk

Contact :

collectif1971@scarlet.be, tél : 02-215 35 76 (F)

kib@skynet.be, tél : 02-230 89 30 (N)


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