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Turquie : Tolérance zéro à la tolérance

lundi 6 août 2012, par Maison Populaire de Genève

La Turquie s’est transformée en un pays de tolérance zéro contre toute forme d’opposition, notamment contre les kurdes, sous la forme d’une politique de« tolérance zéro à l’égard de la torture » et d’une « démocratie avancée » tant vantée par le gouvernement AKP. Les organisations des droits humains dressent des rapports accablants.

Avec des promesses jamais réalisées et quelques reformes de façade imposées par une forte campagne de manipulation et de désinformation soutenue par l’Occident, le gouvernement AKP mène une véritable chasse aux sorcières contre les kurdes et tous les opposants, depuis notamment 2009, après avoir pris le contrôle des médias et de la police d’abord, des services secrets et de l’armée ensuite. Tous ces mécanismes de l’État sont aujourd’hui utilisés pour réprimer les revendications légitimes du peuple kurde partout dans le monde.

Zéro problème avec les voisins ?

La politique de « tolérance zéro contre la torture » du gouvernement a pris la forme d’une politique de torture généralisée dans les rues par la violence policière contre toute manifestation et dans les prisons surpeuplées qui peuvent exploser à tout moment. La politique de « zéro problème avec les voisins » a de son côté devenue une crise politique avec tous les voisins.

Chaque jour, les policiers du régime procèdent à de nouvelles arrestations pour des motifs politiques. Les organisations de défense des droits humains ne cessent de dénoncer les violations flagrantes des droits humains et les conditions des prisons turques surpeuplées où les détenus politiques sont victimes de mauvais traitements systématiques.

Lois répressives restent intactes

Le nombre de détenus est élevé à plus de 130.000 personnes contre un peu moins de 60.000 en 2002, l’arrivée au pouvoir de l’AKP, le parti du premier ministre Recep Tayyip Erdogan. La réforme de la justice récemment annoncée par le gouvernement ne change en réalité rien pour les kurdes. Les tribunaux changent le nom, les mentalités et les lois répressives restent intactes.

Le système judiciaire qui crée des injustices

Les mauvaises conditions de détention et le système judiciaire qui créent des injustices se soldent souvent par des drames, comme la mort de treize prisonniers kurdes dans la prison d’Urfa suite à une protestation contre les conditions d’incarcération inhumaines le 16 juin.

L’association des droits de l’humain (IHD) a dénoncé le 9 juillet dans un rapport semestriel les violations sans précédentes depuis 2002.

Trois générations en prison

Au moins 15.109 cas de tortures et de mauvais traitements ont été constatés au cours des six premiers mois de l’année 2012 dans la seule région kurde, selon le rapport.

« Même une brève déclaration de presse peut conduire à l’accusation d’appartenance à une organisation. Il y a toujours des députés emprisonnés dans ce pays, mais aussi défenseurs des droits humains, maires, politiciens, académiciens, écrivains, journalistes et étudiants. Autant dire que les prisons comptent trois générations en même temps » a affirmé Raci Bilici, le secrétaire de la branche d’IHD de Diyarbakir, chef-lieu du Kurdistan de Turquie.

La torture continue

Alors que les arrestations massives visant tous les opposants continuent, la Fondation des Droits de l’Humain en Turquie (TIHV) et l’Association des droits de l’humain dénoncent la poursuite de la torture.

Toujours dans la région kurde, le rapport de l’IHD indique 398 cas de tortures et de mauvais traitements ont été répertoriés en six mois, tandis que la TIHV affirme avoir constaté quatre morts en garde à vue entre le 1er janvier et 21 juin 2012 à travers le pays contre cinq tout au long de l’année 2011.

L’IHD affirme que 2.675 personnes ont été arrêtées dont près de la moitié (1.006) placées en détention préventive dans la région kurde. Parmi ces personnes figurent des maires kurdes, des centaines d’étudiants, des enfants, des journalistes et des syndicalistes.

En outre, 1.386 personnes ont fait l’objet d’enquêtes, de procès et de condamnations, 632 publications ont été saisies et interdites et la défense en langue kurde devant les tribunaux ont été interdit 292 fois.

L’association a également constaté 1.350 cas de violations dans les prisons et neuf décisions de fermeture contre des partis politiques, syndicats, associations et centres culturelles, ainsi que l’arrestation de 2.176 immigrés.

Liberté d’expression ?

La situation de la liberté d’expression, de presse, de manifestation, d’association et la liberté syndicale a régressé. Des milliers de personnes sont aujourd’hui dans les prisons pour avoir exprimé leurs opinions.

11.994 personnes ont fait l’objet des procès en 2010 pour « propagande d’une organisations terroriste » dans le cadre de la loi anti-terroriste (TMK), selon le Ministère de la Justice, cité par l’IHD dans son rapport pour l’année 2011. Des procès ont été engagés contre 11.462 personnes en 2010, contre 8.251 en 2009, 3.778 en 2008 et 3.294 en 2007, toujours selon le Ministère de la Justice.

La Turquie a connu le 25 juin 2012 la plus vaste opération antisyndicale, visant tous les syndicats affiliés à la Confédération des Syndicats des Travailleurs du secteur public (KESK). 71 membres et dirigeants de la confédération dont le président Lami Ozgen ont été arrêtés. 28 d’entre eux et elles ont été placés en détention le 28 et 29 juin, tandis que les autres dont Lami Ozgen ont été relâchés. Ce qui porte à 67 le nombre de syndicalistes actuellement emprisonnés en Turquie. Plusieurs d’entre eux et elles sont en prison depuis 2009 sans condamnation, ni preuve.

Selon une initiative de soutien aux étudiants emprisonnés, plus de 1500 lycéens et 700 étudiants sont actuellement dans les prisons turques.

En outre, près de 200 élus kurdes dont 35 maires et six députés du principal parti kurde BDP, quelque 100 journalistes, environ 500 femmes activistes du BDP, une quarantaine d’avocats, ainsi que des centaines d’enfants sont en prison.

http://blogs.mediapart.fr/blog/maxime-azadi/090712/turquie-tolerance-zero-la-tolerance


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